Un bout de temps que je n’avais plus écrit, et surtout pas en français, sur ce cher blog abandonné (d'oú son caractère réduit...). La phrase ci-dessus vient de mssieur J. Paris dans un CSOJ sur HADOPI (05/05/09). Les deux photos correspondent au processus de gauchisation de ma pauvre guitare, et á une pale copie d'une photo fameuse de mon brother.
Fin du premier semestre (mais du second semestre chilien, puisqu’en fait, comme nous avons pris l’année en cours de route, la fin du semestre est celle de l’année, mais pas pour nous, donc). Fin du premier semestre. Cela fait maintenant un mois que je vis sans mon mac. Un mois d’enfer, en clavier QWERTY, sans accents, mode chilienne. Un mois que je ressemble de plus en plus á un évadé d’Atika prépubère, les cheveux en bataille style Thom Yorke dans son jeune temps, la barbe de deux semaines á peine visible, les jeans se déchirant au fil des jours, les fringues s’égarant, á droite, á gauche. Un mois que je vis la guitare sur l’épaule, dont le son écorche les oreilles de mes doux voisins, qui me contrent avec des versions hispaniques de Natacha Saint Pierre. Un mois que je me balade dans Valparaiso, les lunettes de soleil crades sur la figure, un keffieh noir et blanc autour du cou. Un mois que les cours s’éteignent, que les derniers devoirs se rendent, que les derniers travaux s’achèvent. Un mois que je dors plus que de raisons, que je m’immisce un peu plus dans l’univers chilien, où même un prof de socio vient dans une soirée, bois du coca, et chante du Quilapayun face á des étudiants sur-révoltés. Un mois que je me sens jeune et vieux. Un mois que je me tue les doigts sur des cordes de guitare trop dures. Un mois d’émerveillement face á la musique. Un mois que je ne prends plus de photos. Un mois où je découvre une petite crique aux accents bretons á quelques dizaines de kilomètres de Valparaíso. Un mois oú la vie chilienne prend tout son sens. Un mois où novembre ressemble á mai.
Fin du semestre, et la jeunesse se barre. Certains rentrent définitivement chez eux, le semestre achevé, des regrets et de la nostalgie au fond des yeux. D’autres tracent leur route vers le sud, le nord, vont vivre ailleurs, faire des stages, découvrir autre chose. Les Chiliens trouvent du taf et planifient le retour en terre d’emploi, pour payer leurs études dont les prix annuels feraient pâlir nos écoles de commerce aux coûts les plus scandaleux. Elle en prend plein la gueule, cette jeunesse chilienne. Les étudiant(e)s ont parfois, et même souvent, des gosses á 20, 21, 22 ans. Un choc frontal. En opposition totale avec la culture contraceptive ultra-ancrée des Occidentaux que nous sommes (l’avortement est évidemment proscrit, logique ultra-catho oblige). Ils jonglent entre les cours, l’éducation de leurs moutards asthmatiques, et parfois un job á temps partiel pour pouvoir crouter. Ils trouvent cela normal. Ils n’ont pas d’aide. Toutes les bourses sont orientées exclusivement sur une méritocratie tronquée, où des naufragés et des déterminés cohabitent. Ils subissent leur modèle de vie. Ils n’ont pas de RMI. Ils n’ont pas d’aides au logement. Et puis, les gens s’en balancent.
Ma guitare dans les bras, cliché d’une jeunesse rebelle sans aucune espèce de réflexion propre et originale, je me dis que la génération supérieure empiète sur mon époque.
Tudy
Vous faites de l'ingérence dans la mienne d'époque.
RépondreSupprimerProposition littéraire pour une ingérence amicale dans un espace public individuel.
RépondreSupprimer« Ideology of everyday life ». Slavoj Zizek.
« USA: donde la libertad es una estatuta ». Nicanor Parra.
C'est à l'aune de ces deux concentrés de réflexion intellectuelle que je veux t'attaquer Tudy, sur son propre Blog.
Tudy, tu écris à l'aune des choses. Tudy tu écris à l'orée de la pensée propre, de ta propre pensée. Tudy enfonce-toi dans la forêt avant d'entreprendre timidement de la débroussailler. N'ai donc pas peur d'aller y trouver le vieux Henry David Thoreau,reclus qui dit ne pas vouloir participer à une société à laquelle il ne se serait pas formellement associée.
Tudy blow as deep as you want to blow comme dirait Jack Kerouac. Tudy fais tes plans sur la comète.Ecrit aux points d’achoppements. Le point d’achoppement, on le retrouve par exemple dans le fait que la fille de Raul Castro soit psychanalyste et que le fils de Che Guevara soit un peintre abstrait.
Recrute plus intensément tes propres bataillons de mots. Mène tes campagnes de « conscientisation » et de réflexion personnelle. Dirige et organise tes escarmouches subversives.
C'est facile de penser, c'est amusant de penser. Évidemment tu penses sans arrêt. Tu peux être l'écrivain, tu peux même être l'écrivailleur si tes écris sont des écriteaux. Ça n'est pas un appel à la radicalisation, mais à l'organisation. L'ordre à ta droite, l'organisation à notre gauche. Du bout du doigt tu effleure l'ideology of everyday life, saisi-la, ose savoir mon vieux. Ces étudiants et cet environnement chilien son un vivier, nous en avons beaucoup parlé. Évidemment, il est difficile d'épingler ces attitudes de classe qui nous paraissent comploter avec l'empire des bons sentiments qui ne se rendent pas compte de l'intérêt d'apprendre à lire.
Mais revenons à nos moutons, -ceux du troupeau des esprits indépendants (d'après la formule de Rosenberg). Le déblatérant Tudy, qui sait penser mais qui n'ose pas toujours lutter contre l'inhibition littéraire qui ne le fera marcher, en mouton bien consentant qu'autour du bâton auquel on a raccordé la laisse.
L'écrivain progressiste doit se tenir sur ses positions dans l'espace problématique général à partir de quoi toute pratique théorique se définit. C'est la position-de-classe dont Badiou nous parle. Investit donc cette position de classe complètement, c'est ton attitude-de-classe. Bien trop marxiste, pour nous tout cela qui sommes raisonnables et qui savons que les classes n'existent plus et qu'elle sont essentiellement la partie desechable de la pensée marxiste. Concept vidé donc qui ne permet plus de garder ce contenant pour aller l'échanger moyennant 800 pesos et continuer à s'enivrer intellectuellement. Du reste c'est une partie du tout et elle permet encore de penser. C'est facile de penser, c'est intéressant de penser. Toi à qui je réfute le statut d'intellectuel, parce que tu ne pense pas aux point d'achoppements et qui pourtant sent bien les choses.
RépondreSupprimerLe mépris d'une personne comme toi me fait reculer, ce n'est pas le but de ce pli. « Tout était cuit, les carottes et le reste » voilà ce qu'affirme Kérouac en parlant de Dean Moriarty. Je n'y souscris pas quand il s'agit de toi et de tes articles, ils sont bons mais je sais que tu n'aspire pas qu'à cela. « Tudy looks like buddha » mais en moins organique; ton sermon de Bènares ne suffira pas.
Sur l’échelle de la beat-itude, Jack Kerouac tient sa génération en dessous de la notre. La roue des ans est revenue se caler sur l’endroit de la beat generation. Aujourd’hui notre génération c’est vrai, est battue d’avance. On m’objectera avec un escient plus ou moins bon que de toute façon, elle n’avait pas l’intention de se battre, qu’elle était incapable même, d’y songer.
Alors pourquoi ne le dis-tu pas: Valparaiso est has been. Ici l'herbe est bien plus verte dans le passé. Et sa faune est décrépie. A ce qu'il parait la bêtise systémique traine ici dans les cerros, encore plus naturellement que les chiens assassinent les chats sous nos fenêtres.