jeudi 2 septembre 2010

''Il ne s'agit pas de stigmatiser une population en particulier. Bien d'autres étrangers sont responsables d'agressions''.


Une fois par mois, jeune insouciant que je suis, faisant ma ''ratatouille'' politique et existentielle (merci Flauflau), j'ai le besoin d'écrire sans exposer.


Ah, une petite précision, avant toute chose. Je vis bien dans un appartement, et non dans une auberge de jeunesse. Non, je dis ça au cas où. N'est-ce pas, M. Mary ?

Le titre lui est d'ailleurs dédié, comme à M. Hortefeux. Je ne sais pas comment il n'éclate pas de rire en disant des conneries pareilles. Ça pourrait être un sketch de Coluche.


Si te tratan como a un delincuente (ladrón)

No es tu culpa, dale gracias al regente

Que arrancara el problema da raíz

Y cambiar al gobierno de nuestro país

(...)

Hay personas que se están enriqueciendo

Gente que vive en la pobreza

Nadie hace nada porque a nadie le interesas


Molotov, Gimme tha power


Je renifle un brin l'air poisseux de la ville. Dehors, les passants continuent d'aller bon train, malgré l'heure tardive qui me pousse à plonger dans les méandres de l'écriture, avec tout ce qu'elle m'apporte, et tout ce qu'elle me prend. Pourquoi donc l'accomplissement laisse-t-elle facilement place à la vacuité ? Je ne sais pas où je suis, ni ce que je fais, et pourtant, je n'est jamais été aussi confiant de mon état présent. J'ai oublié ce que j'étais, ce que je suis. Je veux abandonner le reste derrière, ne garder que ce qui m'importe, que ce qui m'apporte, que ce qui me partage, m'élance, me rabaisse, me hante. Je veux garder la force et la fougue de mon année passée. Acquérir la sagesse de mon année à venir. Rester vertueux. Croire en quoi ? Pas en Lui. Pas en eux. En l'Homme, j'imagine. La force de croire que dans la société figée et dévastatrice dans laquelle nous vivons, où l'homme s'achète à la femme qui se vend, où l'argent est un Eldorado et le reste un détail du paysage, qui porte chaque jour tout un chacun vers son propre enfermement, qui nous ouvre les portes pour nous enfermer, qui nous montre le monde pour mieux nous le voiler, qui nous fait nous complaire dans un système que l'on hait, en nous mettant en garde contre vents et marées d'idées salvatrices qui pourraient bouleverser un ordre en place, ne restera pas assez stable pour que chaque mouton y trouve son compte, et puisse, l'été venu, se faire tondre comme un parfait petit automate. Où est donc la solution salvatrice ? Moi qui ai toujours voulu changer les choses, qu'est-ce qui me permettra de me différencier du crétin mécontent de Télérama ? La volonté seule est maîtresse des choses, et si je parviens à en éviter la perversion, peut-être pourrais-je... Quelle ironie ! S'auto-ordonner de résister à la toute puissance du Moi dans un environnement qui n'exalte que lui. Résister à cela. Se mordre, se taire, se battre. Solutions ? Se savoir et se connaître. Quel plus grand ennemi pour soi que soi-même ? Garde tes ennemis près de toi, et toi-même encore plus proche. Confiance. Prudence. Ordonner les deux pour se faire. Lire. S'instruire. Arrêter les conneries. L'envie fait partie de ce diabolique tandem qui nous fait marcher sur un fil, et atteindre un horizon. Ne pas être trop aigri. Seulement conscient de ce qui nous entoure. Curieux. Optimiste. La seule solution est ici ! Le sourire. La conscience. L'ambivalence est là.


Ce matin, je n'ai pas cours. Je n'ai pas cours, et ce, parce que les mouvements sociaux étudiants ont commencé. Et me voici face à mes propres contradictions, et à ma propre lâcheté. Gandhi, comme s'amuse à me le rappeler à longueur de journée ce marxiste de Simon, disait, parait-il, ''qu'entre la lâcheté et la violence, [il] choisirait toujours la violence''. Selon les opinions contradictoires que j'en ai, un étudiant étranger n'a pas le droit de manifester ici. C'est-à-dire que si jamais la manif' se barre un brin en live, ledit étudiant risque de se faire retirer son visa, voire renvoyer chez papa/maman. Face à cette menace nouvelle, j'ai préféré pour l'instant ne pas tenter le diable. Décision difficile à prendre, risques à sous-peser, dilemme cornélien en vue. Je pense à tous mes potes frenchies qui n'iront pas manifester le 7 septembre. Ça m'énerve, d'être prostré par la légalité, quand la liberté des autres n'est pas utilisée. Bordil.


Nouveau colocataire. Jorge est un Chilien du sud: barbe de 79 jours, cheveux longs, le regard amusé derrière ses lunettes rondes. Etudiant en administration publique. Je reviens d'un match de foot meurtrier, où j'ai perdu un genou, et qui sait, peut-être la possibilité de ne jamais faire d'enfants, après une trajectoire de ballon infortunée, et je le croise enfin dans les couloirs de mon appart'. On discute rapidement. Je m'en vais dormir... je me retourne, et je lui demande s'il veut partager une bière. Et nous sommes partis. Directement, quelle surprise, après quelques formalités d'usage sur nos provenances respectives, nos villes natales, et nos projets cette année, nous parlons de politique. Jorge est dans une situation que je qualifierais de contradictoire: fils d'un militaire, qui donc était militaire durant la période 1973-1990, et partie prenante de l'administration Pinochet, il fait face à l'histoire de son pays, comme à son évolution politique, avec un cynisme qui me désarçonne. Il justifie l'élection de Piñera, et, en partie, le coup d'Etat de Pinochet. Il fustige les appels démocratiques hypocrites, et argue que, de toute façon, le Chili est, et a toujours été, directement dépendant des Etats-Unis. Il taille son raisonnement à la serpe: le romantisme gauchiste ne lui parle pas. Il veut du pragmatisme, se contrefout de la gauche comme de la droite, qu'il dénonce à peu près dans les mêmes proportions, prône une économie capitaliste renouvelée. Et peu d'idées politiques. Et il en va de cela avec à peu près tous les sujets. De la cause Mapuche, au conflit larvé avec les pays voisins (Pérou, Bolivie, Argentine), il ne mâche pas ses mots. ''L'Amérique Latine a longtemps été jalouse du développement du Chili. Le Brésil est en passe de devenir ce nouveau leader économique. L'Argentine a échoué à occuper un tel poste''. On dirait qu'il s'intéresse, et s'en balance en même temps. Il parle d'impérialisme yankee, et ce, comme c'était devenu une forme de norme, une évolution ancrée dans l'histoire du continent. J'essaie de ne pas passer pour l'Européen couillon de base. Mais je lui rappelle tout ce que je peux sur l'oppression américaine sur l'Amérique Latine, depuis la Doctrine Monroe, jusqu'aux interventions reaganiennes au Nicaragua. Depuis l'emploi français du mot ''Américain'' pour désigner uniquement les Etatsuniens, jusqu'à l'élection démocratique d'Allende, salement stoppée. Il acquiesce. En vérité, il est cultivé, blasé, et ouvert à une politique que je ne connais pas, qui ne me parle pas. Il parle de projets locaux, de développement ciblé, sans idées derrière. Comme un décorateur, un administrateur. Etrange. Par ailleurs, il est juste excellent en tant que colocataire. J'en demande pas plus.


Pour mes autres états d'âme, je vous renvoie au dernier article de sieur Chevalier (blog mentionné dans un article précédent), qui dépeint d'une manière extrêmement exacte l'impossibilité d'être subjectif dans un tel voyage. L'impossibilité que nous avons de vivre sans réfléchir, de prendre sans demander, de profiter gratuitement. Et, selon moi, c'est tant mieux. A chacun ''la découverte, ou l'ignorance'' (formule facile s'il en est, mais que j'apprécie quand même).

Petite nostalgie du pays. Il ne sera plus le même quand je reviendrai, et je ne serai plus le même. Est-il possible de se revoir soi-même ?


Comme dit mon très cher Xavier, Die Leute sagen immer, die Zeiten werden schlimmer. Die Zeiten bleiben immer, die Leute werden schlimmer. Je vous laisse méditer.


Tudy

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