I've been through the desert on a horse with no name,
It felt good to be out of the rain...
America, A horse with no name
Petite mise au point. L'article qui va suivre relate le voyage depuis Valparaiso jusqu'au désert d'Atacama, avec quatre amis étudiants. Les récits des fiestas patrias qui commencent tout juste aujourd'hui, seront donc reportés à un peu plus tard. Décalage donc. Si vous n'avez pas aimé Into the Wild, ou tout esprit romantique lié au voyage, revenez dans une semaine. Ce que vous allez lire est en fait un remaniement de nombreuses notes prises pendant la semaine.
Vendredi 10 septembre.
Nous fuyons de Valpo dans un van huit places, où nous ne sommes que cinq (Adri et Garazi, deux espagnoles, Flo, vadrouilleur sportif bilingue, Simon, compagnon de toujours, et moi-même, pour ceux que les détails intéressent. Comment, non ?). Nous fuyons sa beauté, sa réalité, ses promesses. Nous retrouverons celles d'un Chili désert, désertique, déserté. Je ne sais pas quel mot employer. Une bande de terre de 4 000 km de route, d'asphalte, de goudron, de terre. Les camions échoués le long de la route, et tout le tralala.
Les premiers instants sont magiques. Dans un van bien trop moderne pour être conforme au rêve hippie que j'en ai, nous ne savons pas où nous allons, nous ne savons pas où aller. Seuls, face à la liberté immense, et pourtant ridicule, d'une semaine de choix et de hasards face à un pays, face à un continent, face à un romantisme du voyage que tout le monde ne partage pas. Au sortir de la ville, une végétation plutôt commune, des petits villages à droite à gauche. Rapidement, l'urbain devient campagne, et nous traversons au pas de course des villages de pêcheurs, lovés face à l'océan Pacifique, qui agit sur moi avec toujours autant de force. A toute berzingue, du Bob Dylan à fond dans la voiture, nous avalons les distances, les plaines de plus en plus désertiques. Après les ''Yeeeeeeehaaaa'' du départ, l'ivresse de la porte qui s'ouvre à nous, nous rejoignons rapidement la Panaméricaine. Ou Rota 5. Trachée goudronneuse qui éventre le Chili (oui, je sais, mes métaphores sont foireuses, mais ça m'amuse), elle suit la mer, frôle les premiers massifs montagneux de la Cordillère des Andes. Elle quitte rapidement la Ve région, pour rejoindre les premières plaines arides de la IVe région, située au nord de la baie de Valparaiso. La végétation se fait de plus en plus minime, les villages moins fréquents. Alors que la nuit tombe, et que nous n'avons, bien évidemment, aucun endroit où dormir, nous nous rendons compte que les hameaux ne sont non pas rares, mais bien inexistants au long des dizaines de kilomètres que nous parcourons. Visite d'une plage venteuse, rocheuse. La nuit tombe sur le pays, nous n'avons même pas le temps d'apprécier le coucher du soleil fantastique qui s'offre à nous. Après quelques moments de léger stress, nous retrouvons les thermes de Socos, seul refuge touristique à des années-lumières (du moins dans mon imaginaire) à la ronde. Camping fermé. Tant mieux. L'hôtel hors de prix situé non loin nous indique que nous pouvons squatter les environs sans danger aucun. Nous installons le van entre deux arbres protecteurs. Nous ne savons absolument pas où nous sommes. Et nous nous en balançons éperdument. Un ciel étoilé (que je ne connais en rien, puisqu'il appartient à l'hémisphère sud...) de puta madre. Je regrette un temps mon ciel familier du nord. Et puis je m'y fais. Pas le temps, pas de lumière pour installer une tente. Tant pis. Repas frugal, quelques bières, des discussions à la belle étoile. Il fait froid. Putain qu'il fait froid. Nuit à cinq dans le van. Inconfortable. Drôle. Je dors la tête déjà pleine.
Samedi 11 septembre.
A cette heure, je ne pense pas au Twins Towers. Ni même au coup d'Etat de 1973 exécuté ce même jour. Je me réveille endolori, dans un décor que nous n'avions entraperçu que de nuit. Plutôt aride. Des premiers cactus nous font face. Un berger à cheval passe sur une colline au loin en gueulant pour faire avancer son troupeau. Son chapeau sur la tête, il me fait penser à un gaucho. Rapidement, nous levons le camp, et repartons vers le nord. Direction, le coeur de la IVe région. Impression d'être écrasé par l'ampleur de la liberté miniscule qui me fait face. Je me prends à nous voir comme un bateau à la dérive, allant où il veut, où il peut, où il doit aller.
De repente, le paysage devient désertique. Cours passage à la Serena, seule ville en activité dans cette région très peu peuplée. Sans grand intérêt. Simple point de chute pour s'envoler vers la vallée d'Elqui, terre montagneuse située à quelque distance de la Cordillère. Passage par un barrage impressionnant. Lac qui s'étend à perte de vue, d'une couleur azurée. On fait les cons. On prend des photos stupides. On se sent vivant. Nous repartons vers le cadre magique de la vallée. J'ai certainement l'air bête, et je m'en fous: jamais je ne serais rassasié de la majesté d'une montagne. Et je me dis aussi que je le serais peut-être encore moins d'un cadre désertique comme celui-là. La vallée d'Elqui est difficilement descriptible: c'est un enchaînement de montagne de terre, où nulle végétation ne pousse. Ce qui paraît être des dunes de roches immenses, et qui se multiplient. Région connue pour sa production de Pisco (sorte d'alcool à mi-chemin entre le vin et... enfin, un truc qui y ressemble, mais en plus fruité), les champs de productions s'étendent à perte de vue, depuis le flan même des montagnes jusqu'à l'aval lointain de la vallée. Le van continue sa route, à toute vitesse, en s'enfonçant à l'intérieur du Chili. Vers son coeur. Sur les conseils avisé d'un Chilien, gardant une office du tourisme improbable, logée au milieu de nulle part, nous arrivons dans le pueblito perdu d'Horcon. Village construit sur deux étages. Silence de cathédrale. Vision sur toute la vallée. Autour d'une rivière avenante, cachés par la végétation et les saules pleureurs, nous trouvons l'endroit décrit plus tôt. Endroit rêvé. A l'abri, magique. Oups, un cheval se trouve sur l'endroit où je vais planter ma toile de tente. Advienne que pourra. Plantage de tentes. Le bruit continu de la rivière nous berce. Un asado, un feu de camp, suffisent à éclairer notre soirée, sous le regard des étoiles innombrables. La comida prend une saveur toute nouvelle. Celle de l'incertitude. Les discussions pleuvent. La nuit est courte. Très froide. Très belle. Nous devions visiter un observatoire avoisinant (autre caractéristique notable de la région). Pas le temps. Je m'endors avec moins que rien pour confort qu'une couette d'un mètre sur un mètre, et des cartons en guise de matelas. Mes articulations souffrent pour moi. On se marre, on s'endort.
Dimanche 12 septembre.
Lever aux aurores. Enfin, en tout cas, c'est ce qui me semble. Un froid impressionnant. Les mains gelées, l'esprit embrumé, j'aide péniblement à démonter les tentes, avant que nous ne reprenions les routes escarpées de la Rota 5. C'est un peu notre Road 66 à nous. Pas de douche depuis deux jours, et un barbecue dans les dents. Je porte, au bas mot, trois paires de chaussettes, trois T-shirt, un coll-roulé, et une veste en cuir qui prend cher de par sa multifonction (à la fois manteau, oreiller, pull, etc.). Me sens malade. Les routes escarpées et parsemées de virages me donnent la nausée. Le paysage reste un divertissement unique, irremplaçable. Source de richesse, d'émerveillement constant. Les vallées défilent. Le lac est agité par un vent violent.
La première vraie anecdote de voyage apparaît. Après des courses-éclair au Jumbo (équivalent de notre Géant, truc insupportable et trop grand), à l'heure du départ, Adri essaye de démarrer. Le bruit est à peu près le suivant: ''TUTUTUutututuuuuu...''. L'onomatopée parle d'elle-même. Pas de batterie. Phares restés allumés. Sommes condamnés à manger notre great pique-nique sur le parking (ô combien en conformité avec la vision romantique que j'ai du voyage), et ce, à même le sol. Les gens nous prennent peut-être pour des gens du voyage (''z'ont pas d'argent, mais z'ont des voitures, hein !''). Un Chilien venu du ciel (ou, comme on l'appelle Simon et moi, du Capital) nous apporte une prise qu'il vient d'acheter pour nous offrir un peu de batterie. J'ai déjà connu de nombreuses scènes similaires avec ma maman. Pas de stress, on va repartir. Mais Dieu (ou, comme on l'appelle Simon et moi, Karl M.) s'amuse. Adri, soudainement, se rend compte qu'elle a perdu les clés. Scène tragi-comique. Le Chilien est là, avec sa caisse, les prises prêtes. Et on ne peut pas démarrer... Fouille de la voiture dans rage folle. ''¿ Tienes las llaves ? ¿ No ? ¿ Donde estan las putas llaves ?''. Le dialogue, s'il n'était pas celui-là, y ressemblait fortement. Dix minutes plus tard, les clés en poche, nous pouvons repartir, le réservoir alors à moitié-vide, vers le nord.
Le paysage est désormais un vrai désert. Les montagnes se jettent dans le Pacifique, et seule notre petite Panaméricaine (soudainement devenue, non pas une quatre voies, mais bien une deux voies... soit nos nationales françaises. Sauf qu'ici, c'est la seule route, la seule, qui joignent le nord et le sud du pays) vient entraver cette embrassade. Sourires aux lèvres. La musique s'éteint à mesure que les batteries de l'ordinateur disparaissent. Les camions sont légions, les gens qui vont à 140km/h également. On apprend rapidement les joies de tourner à droite (et encore plus à gauche) sur une route comme celle-là (soit la peur de mourir à toutes ces occasions, puisqu'il faut passer de 110km/h à 20 en l'espace de 10 secondes, sous les klaxons des routiers de passage. Nous nous enfonçons finalement sur une route de terre, accrochés à la voiture, et à nos cinq sens en plein éveil. Vingt kilomètres plus tard, des cactus plein les mirettes, une ligne de train digne d'un Western traversée, nous arrivons à Los Choros, avec pour tout bagage cinq litres d'essence dans le réservoir pour retrouver la civilisation. En d'autres termes, quarante kilomètres plus tard, nous sommes à plat. Bien moins de distance qu'il n'en faut pour trouver une station essence par ici. Dans ce village perdu, un habitant nous aide. Un vieil homme en col bleu, chemise à carreaux, pantalon tâche, chaussures poussièreuses, arrivent avec des bouteilles d'essence de SP95. Il nous en vend vingt litres. Scène très étonnante pour le petit citadin que je suis, qui ne voit l'essence que sortir magiquement de la pompe. Vous croyez que l'expérience nous aurait vacciné pour le reste du voyage ? C'est mal connaître les inconscients que nous sommes. Mais nous y reviendrons plus tard.
Los Choros est un village de rêve. Perdu entre une bande de vingt kilomètres de désert, et la même distance vis-à-vis de l'Océan lointain, il y règne un parfum d'une société qui n'existe plus que par bribes, par endroits. Après une route non-entretenue bien longue, nous voilà au bout du monde. Une pointe de terre au milieu de nulle-part. Un lieu touristique qui s'élève depuis le rien. Ou plutôt depuis le tout. On s'installe, cette fois-ci, dans un camping qui borde la mer. Ça gave de payer. Mais bon. Le feu de l'asado est faible, mais assez fort pour réchauffer les coeurs comme les esprits. A l'abri, nous plantons les tentes. On s'endort lourdement.
Lundi 13 septembre.
Réveil sans vent. Incroyable. Douche glacée. Léger retour à la civilisation, par le biais de ce camping, directement situé face à la mer. Quelques voyageurs y trouvent leur compte. Le soleil tape dur. Nous profitons. La journée se passe tranquillement. Nous arpentons les hauteurs de la Côte sauvage chilienne, qui n'est pas sans rappeler les paysages bretons, face au vent, ainsi qu'à un soleil de plomb. Dans une crique abandonnée, des campeurs aventuriers profitent d'un cadre de vie et d'une vision du Pacifique irremplaçables. Nous nous installons sur une plage ''propriété privée''. Je ne me sens pas à l'aise, malgré tout mon amour pour l'anarchisme, à squatter cette plage de sable blanc déserte, visiblement propriété d'un hôtel quelconque. L'eau reste très belle, très froide. Comme le pays, ce me semble. Le soleil tape dur. On me dit que je ressemble à un homard. Je crois que c'est vrai, vu la marque des lunettes de soleil. De retour au campement, nous profitons une dernière fois de ce cadre normée pour élever un asado et un feu de camp devenus traditions. Le rêve de voyageur s'éloigne avec ce retour à des normes plus classiques. Je le regrette un peu. Nous sommes rapidement gagnés par la tyrannie du confort. C'est plus facile comme ça. J'ai hâte de repartir, mais apprécie lâchement ce confort retrouvé. La nuit est belle. Le coucher de soleil impressionnant.
Mardi 14 septembre.
J. Kerouac + Christopher McCandless = Désert d'Atacama.
9h. Echec face à une possible excursion sur une île proche, supposée peuplée de pingouins, de baleines, et de dauphins. Les pêcheurs du coin, pourtant vieux loups de mer, ne peuvent pas sortir dans la baie, face à un vent déchaîné, à une mer agitée. Moi, je me fous de voir des pingouins. Mais bon, les autres ont l'air d'y tenir. Finalement, nous ne partons pas, supériorité de la nature oblige. Ça me va pas plus mal. Cette journée sera en fait la meilleure de toute la semaine.
Direction: le désert fleuri, soit le sud du désert d'Atacama, le, ou l'un des déserts les plus arides au monde. Toute la journée, nous roulons, nous roulons, et nous roulons encore. J'ai encore dans la tête la ligne blanche de la route qui semble s'étendre à l'infini. Le paysage maritime laisse rapidement place à des routes montagneuses et arides. Entre deux plaines désertes, des petits villages de pêcheurs ou de touristes apparaissent, la mer en arrière-plan. Immersion fictive au sein d'une liberté retrouvée. Impression débordante d'un fantasme de voyageur enfin assouvit. Et là, à l'instant où nous ne nous y attendons pas, le désert fleuri apparaît.
Tous les cinq ans environ, un courant sous-marin ironiquement appelé ''El Niño'' (l'Enfant), apporte un anticyclone nouveau. Par je ne sais trop quel phénomène climatique probablement passionnant, mais dont je me contrefous malheureusement, des pluies plus importantes tombent alors sur la région désertique. De là, d'improbables fleurs viennent à voir le jour, au milieu de rien. Comme ça. Au milieu de nulle part. Tout à coup, des couleurs roses, bleues, blanches, jaunes, viennent donner vie aux terrains stériles du désert. Et ma culture de geek ne me dit qu'une chose: bordel, on se croirait dans un Final Fantasy, ou un Myazaki. Comme le Dieu-cerf de Princesse Mononoké qui de rien vient faire naître des fleurs sous ses pieds. Le bulbe apparaît, la fleur avec. Pour un temps restreint, une seconde ou six mois, qu'importe, le lieu s'en trouve changé, bouleversé. Avec magie. La vision est tout simplement hallucinante. Féérique. Je me prends pour Squall, ou Achitaka. C'est vraiment beau à pleurer. Les champs de fleurs apparaissent ça et là. Nous sommes émerveillés.
Rarement je n'ai autant apprécié la partie ''voyage'', déplacement, d'un voyage. La route est à nous. Nous nous arrêtons, le temps d'une photo, d'un arrêt, ou d'une clope. Les paysages, les villages. Tout semble ouvert, riche, possible. Les quelques villes, tellement rares, qui se trouvent entre la Serena et Antofagasta sont semblables à des villes de Western. Daisy Town. Petites, fondées, sur du sable. La nuit, les lumières apparaissent au milieu de rien, disparaissent en un rien de temps. Une ligne ridicule de chemin de fer vient renforcer encore un peu plus cette vision d'un endroit oublié, perdu. J'adore ces visions sans marque humaine. Nous sommes la tâche du désert de Beauté. Nous sommes l'intrus d'un milieu naturel sauvage, qui nous dépasse, nous dépassera toujours. On sort de la Panaméricaine. Ou la Panam' comme j'aime à l'appeler pour faire semblant qu'elle m'est familière. On prend une route de terre en piteux état. Rectiligne. Elle se fond jusqu'à l'horizon. Je suis dans un état (prochhhe de l'Ohioooo) d'émerveillement complet. Visite de Puerto Viejo. Petit Valparaiso face à la mer. Des maisons de toutes les couleurs. Pas une âme qui vive dans le village qui nous parcourons de long en large. Tout est fermé. Ce que le Guide du Routard présentant comme un village populaire de pêcheurs est en fait le refuge de riches Chiliens (enfin riches... disons, résidents de deux maisons) pour les week-end et les vacances. Un village entier. Fantôme. En tout cas, en ce mardi de septembre. Après avoir visité des routes de sable improbables, visité des plages ''vierges'' loin de l'être (tout est bon pour appâter le touriste), nous choisissons d'établir notre camp de fortune entre deux rochers, à quelques mètres de la plage. De ce rien, nous faisons un feu, une chaleur, d'où émane des rires, des discussions, et même Tintin. Enfin, je crois. Au réveil, je me sens complètement conquis. Face à la mer agitée dès cet instant, j'ai l'impression d'embrasser le pays. Le désert s'étend derrière nous, paisible. L'image du brouillard jouant avec les vagues alors que le soleil tarde à se lever restera.
Mercredi 15 septembre.
Quelques minutes pour apprécier l'écume des vagues nous ayant bercé toute la nuit. Petit-déjeuner frugal, comme dab', tentes pliées. Van enfoncé dans le sable. Quelques instants d'efforts plus tard, nous revoilà sur la route du nord. Objectif ultime: Caldera et sa côte voisine. Petit village de pêcheurs sympathique. Visite rapide d'un port multicolore. A huit cents kilomètres de Valparaiso, je me sens loin, très loin.
Michael Jackson en fond sonore. Très fort. Quelques clichés sur les plages abandonnées des alentours. Derniers instants de farniente face à l'océan, décidément énervé. Les vagues viennent s'exploser sur les rochers que nous parcourons. Van absolument sale, crasseux. Nous aussi. J'ai les cheveux en bataille, l'esprit occupé, le coeur ailleurs, le jean tâché. Envie de découvrir davantage. D'y passer plus de temps, plus de vie. De pouvoir rouler encore dans cette liberté fictive. De se sentir vivant dans le voyage, encore un peu.
Mer. Montagne. Désert. Trois éléments. Le Chili.
Heure du retour, déjà. Je regarde les kilomètres s'effacer alors que nous roulons vers le sud avec une nostalgie certaine. Fin de l'histoire.
Fin de l'histoire ? Pas encore. L'expérience est une chose étonnante. Alors que nous quittons Copiapo, personne ne voit que notre réservoir n'est rempli qu'à un quart de sa capacité. Et au Chili, les stations ne voient le jour que tous les... 178 kilomètres. En tout cas, dans la IIIe région, telle est la loi. Après la moitié de cette distance parcourue, nous nous rendons compte de cette erreur. Grosse erreur. On en rit, on se marre. La nuit tombe. On roule à 70 pour essayer d'atteindre la station prochaine. Impossible. L'aiguille descend douloureusement sous la barre du minimum d'essence. Ouille. Ça stresse, ça imagine des scénarios catastrophes. Il est vrai qu'une panne sur une route comme celle-là, merci. Premier arrêt. Pas d'essence. Deuxième arrêt. Un litre et demi à portée. Trop peu, bien trop peu. Va-t-on dormir dans le désert, au bord d'une route si passagère ? Un autre Chilien providentielle, la chemise tâchée, une dent en moins, vient, ex-nihilo, à notre rescousse. Il parle vite, avec le sourire. De son bidon d'essence planqué dans son coffre, il commence à siphonner du sans-plomb. Alors qu'il a la bouche pleine d'essence, et que l'effet des vases communicants prend corps, il lâche: ''quelqu'un aurait une clope ?''. J'explose de rire. Il nous vend, pour une bouchée de pain, les litres manquants à notre route. Excellent.
Dernière nuit à l'intérieur des terres chiliennes. Ne voulant renouveler l'expérience du van, je dors seul dans une tente à proximité. Le ciel est beau. Très, très beau. La poésie de l'endroit est à tomber à la renverse. Je respire l'air frais des alentours, et m'engouffre dans un sommeil profond et trop court. Les derniers instants de route avant le retour restent fidèles à eux-mêmes. Pas envie de lire. Ni de parler. Juste de voir, de regarder, de saisir le décor qui m'entoure. Fin de l'histoire.
Bordel, il y aurait tellement plus à dire, tellement plus à décrire d'un voyage pareil. Mon récit est déjà trop long, déjà trop court. Le reste n'est malheureusement qu'à nous. Le tout est nécessairement à refaire.
Tudy
En quelques mots, je dirais juste "Putain c´est ça qu´on veut". Recit tres evocateur qui ne nécéssite meme pas de photos tant les descriptions font défiler les images et les paysages. Mention séciale au desert fleuri et aux références a Myasaki, qui permettent tres bien de s imaginer la beauté de la chose.
RépondreSupprimerContinue de nous faire voyager frangin. C est que du bonheur.
Héééé j'ai dit tu mets cette chemise UNIQUEMENT pour les soirées cocktail ou les invités sont polis et mettent leur cendres dans des cendriers...pas pour aller dans le desert d'Atacama... Ouais ouais fait nous voyager d'accord mais torse nu ou avec tes T-shirt de ton université de communiste...
RépondreSupprimerJe sur-like cet article, de loin le plus éprouvant à lire par sa longueur (et non pas "de par", n'as-tu donc rien retenu du temps où tu te préparais à intégrer L'École ?), mais de loin aussi le plus éprouvant par les kilomètres parcourus et les métaphores qui en jalonnent la route... Tu écris vraiment bien espèce d'enfoiré, à tel point que, en effet, les photos se retrouvent bien pâles...
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