dimanche 3 octobre 2010

''Te declaro mi amor, Valparaíso...''


Moins d'écrits ces temps-ci. Moins d'articles donc. L'inspiration, ou plutôt l'envie d'écrire, est une garce. Ou peut-être moi-même suis-je un angoissé de la page blanche. Grâce à ma douce Joan Baez, je retrouve quelques mots à partager. Ci-dessus: asado en los cerros de la ciudad. Titre piqué à Pablo Neruda, qui parla mieux de la ville, que quiconque le fera jamais, semble-t-il.



La vie est douce.

A Valparaíso, commençait vendredi le festival des milles tambours, sorte d'ode continue à la percussion, à la danse, et à tout ce qui peut exister de kitsch. Ambiance très ''brésilienne''. Des jeunes se ruent vers les groupes de percussionnistes, qui, à l'aide de djembés, de tambours, ou d'instruments plus improbables, comme une poêle à frire, ou des casseroles démembrées, font un boucan d'enfer, ou plutôt un concert du tonnerre. Atmosphère survoltée. Un groupe à gauche, à droite, derrière, devant, les musiques se mêlent, les rythmes s'embrouillent. Un groupe de types déguisés en militaires sortent les cuivres. Un groupe d'une trentaine de nanas, habillées en squaws, se trémoussent sur des rythmes effrénés. Plus impressionnant encore, un groupe de jeunes filles, accompagnées par quelques jeunes garçons pré-pubères et sans doute les hormones en ébullition, se déshabillent complètement, ou presque, et se peinturlurent le corps avec passion. Dans le plus simple appareil, avec un vent à décorner les boeufs, les voilà qui s'affichent, dansent, comme si de rien était. Ils n'ont franchement pas froid aux yeux. Et pour être tout à fait honnête, on ne sait plus ou donner de la tête, qui, quoi regarder. Jamais cru qu'il y avait tant de jolies filles à Valparaiso. Progressivement, la fête devient une marche. La foule traverse les cerros en suivant les danseuses et les percussionistes. Le rendez-vous est l'occasion de retrouver la majorité des têtes déjà connues de la ville. Un ami français frappe sur son djembé, le sourire aux lèvres. Des jongleurs enflamment des bolas, des bâtons du diables, ou des massues. Ça sent le kérosène. Des clowns passent à vélos. Les vibrations des tambours continuent à résonner dans l'ensemble du cerro. Ça sent la marijuana. Nous avançons en rythme, alors que la nuit commence à tomber sur la ville. Valparaiso est illuminée, joyeuse, et, disons-le, un brin à la dérive. C'est en effet ce que je me dis en voyant le style de vie des amoureux de la cité. C'est un peu la décadence dans la bonne humeur. Etrange.


Mais, dans ce florilège de bruits, de couleurs, d'âmes en peine, je retrouve la force de cette ville incroyable qu'est Valparaíso. En traversant les cerros, en observant depuis les hauteurs le soleil couchant sur le port, en observant s'allumer les milliers de lumières qui couvrent le paysage la nuit tombée, je prends une énième fois conscience de la beauté de l'endroit. Et ce qui suit est un grand n'importe quoi. Mais c'est ce que la tumultueuse Valparaíso m'inspire.


La ville est ivresse. Une ivresse de découverte impossible.


La ville est recherche de ce qui n'existe pas. Et c'est au sein de cette impossibilité que se crée sa poésie. Voir sans découvrir, ressentir sans sentir, imaginer sans matière.


La ville est monstre atroce, horrible, pourri par la vie de bohème, et les promesses alternatives qu'elle ne peut tenir. Sa population étrangère s'y engouffre, et se marre.


Valparaiso est le vide. Et satisfait.


Valparaiso est l'impossible, et se découvre chaque jour un peu plus, faisant naître la tentation, au recoins de ses rues, de ses ruelles, de ses avenues. Et meurt sous le poids de son propre charme.


Valparaiso est victime de ce qu'on veut qu'elle soit. Et, créature difforme, finit par le devenir.


Valparaiso n'est rien, et en cela, est tout.


Valparaiso est une colline immense, un caveau sans fond.


Valparaiso est un port qui dépérit, et ne veut se l'avouer. Les dockers affamés vous embarquent, pour quelques sous, et vous font visiter une baie sans essence, sinon celle du passé.


Valparaiso est une femme, qui de ses bras affectueux, vous embrasse et vous aime, vous endort, toujours veille.


Valparaiso est une garce, qui attend la faiblesse, vous saisit et vous hache, à la moindre inattention. Et vous broie et vous mange, sans autre attention.


La ville est éphémère, chaque jour elle renaît.


La ville est une fleur, qui sans boutons aucun, vous enivre, et puis pleure, sans vous le faire comprendre. Elle se hait, elle le sait, et regrette son sort.


Valparaiso est métaphore. Une épave multicolore.



La vie est douce. Puisse-t-elle le rester.


Tudy

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